De la frontière équatorienne à l’hôpital 

J’ai à peine pris mes marques en Colombie que je traverse déjà la frontière pour passer en Equateur où je ne sais pas trop à quoi m’attendre. Les formalités administratives se font 3 kilomètres après la frontière marquée par le Rio San Miguel. Il s’agit simplement, en quelques minutes, d’obtenir son tampon de sortie de Colombie et un visa de séjour de 90 jours en Equateur. Ayant passé la frontière relativement tôt, j’arrive rapidement à Lago Agrio qui est la première grande ville après la frontière. C’est l’occasion de déjeuner mais surtout de faire laver mon linge et m’acheter une nouvelle carte SIM.

Le lendemain, après un petit déjeuner trop copieux, j’ai du mal à démarrer cette seconde journée en Equateur. Il fait un peu chaud et je sens que j’ai trop mangé et surtout que je n’avance pas. J’ai des nausées et je mets beaucoup de temps à reprendre mon rythme. Ça m’énerve car je suis relativement en forme et je souhaite arriver rapidement à la Casa de ciclista de Tumbaco où j’espère pouvoir me reposer quelques jours et rencontrer d’autres cyclo-voyageurs pour échanger sur le parcours et pourquoi pas faire un bout de chemin ensemble. J’ai aussi un nouveau défi qui m’attend, le passage d’un col à plus de 4000 mètres d’altitude. En début d’après-midi, je commence à me sentir mieux mais une étrange activité retient mon attention et je reste un long moment à observer et à discuter avec des ouvriers. En effet, ces derniers s’occupent de transporter des sacs de sable et de gravier à un kilomètre et demi à l’aide d’un sytème de cordes, de poulies et d’un moteur. Il semblerait que ça soit pour la construction de massifs de pylônes pour la ligne à haute tension du barrage hydroélectrique (information à prendre avec des pincettes car je ne suis pas sûr d’avoir tout compris). Le système est astucieux mais semble se coincer régulièrement.

Ouvriers convoyant des sacs de sable
Ouvriers convoyant des sacs de sable

Le choix de passer par la partie « Oriente » de l’Equateur devait me priver de passer par le lieu symbolique de la Mitad del Mundo, point par lequel passerait l’équateur. On m’avait dit, qu’en Equateur, il existait deux lieux différents qui revendiquent le passage de la ligne imaginaire, l’un près de Quito et un autre un peu plus nord. C’est finalement au passage d’un village que j’apercevrai un autre monument de ce type et qui marquera mon passage symbolique dans le hémisphère sud.

Monument la Mitad del Mundo en la Amazonía
Monument la Mitad del Mundo en la Amazonía

La fin de journée arrive rapidement et j’ai fait à peine 50 kilomètres, je suis loin de la centaine que j’avais prévu… Je décide d’avancer au moins jusqu’à l’Hosteria del Reventador (un hôtel) à une quinzaine de kilomètres après le village du Reventador. Un peu moins d’une heure plus tard, j’entame la descente et malheureusement, dès les premiers virages, je sens que je vais trop vite, je freine et je dérape. Je n’arrive plus à contrôler mon vélo et je termine dans le ruisseau qui longe la route. Je prends vraiment une grosse gamelle mais je me relève rapidement. Je sens que ma tête a tapé quelque chose lors de la chute et je m’aperçois rapidement que je saigne. Là j’ai vraiment très peur, je flippe comme un malade et je suis en état de choc mais je me mets au milieu de la route pour arrêter le premier véhicule qui arrive.

Entaille dans la tête
Entaille dans la tête

Un pick-up arrive rapidement et le conducteur s’arrête et propose de m’emmener jusqu’au village du Reventador mais je ne veux pas car je me suis arrêté dans ce village moins d’une heure auparavant et je crains de ne pas être pris en charge correctement là-bas. Quelques instants plus tard, un van s’arrête avec un groupe d’hommes qui travaillent pour le chantier du barrage hydroélectrique à quelques kilomètres et proposent qu’on aille dans leur campement où il y a un médecin. Les hommes chargent mon vélo à l’arrière du pick-up et je monte à côté du conducteur. Dans la voiture, je craque, je fonds en larme, je m’en veux terriblement de ne pas avoir mis mon casque. Je vous entends me dire : « mais comment ça, tu n’avais pas ton casque ?« . Ben non, je n’avais pas mon casque. Le matin, je me sentais pas bien, j’avais chaud alors je l’ai enlevé en me disant que de toute façon, ça ne faisait que monter… Le chauffeur essaye de me consoler et j’apprends qu’il n’est autre que le gérant ou le propriétaire de l’Hosteria del Reventador où je comptais justement aller. Il me dit qu’on va me soigner et qu’après si je veux, je peux venir me reposer à l’hôtel quelques jours gratuitement puis aller visiter la fameuse cascade de San Rafael (200 mètres de haut et 60 mètres de large) à quelques kilomètres de là. Je l’entends même appeler avec le talkie-walkie pour demander de laisser une chambre de libre ! C’est vraiment très gentil de sa part mais moi, je ne pense qu’à une chose, trouver un médecin rapidement pour être pris en charge. Heureusement, on arrive rapidement à la base vie des employés du chantier et on nous dit que le médecin est en congés mais Pablo, un infirmier, arrive rapidement. Il s’occupe très bien de moi en nettoyant mes blessures mais malheureusement il n’a pas le matériel pour me faire des points de sutures sur la tête dont j’ai besoin. Alors, l’équipe médicale de la base m’emmène à l’hôpital de Baeza à une heure de route. On grimpe dans l’ambulance, je suis toujours avec mon short alors on me passe deux ou trois vêtements de mes sacoches et on fonce !

Dans l'ambulance avec Pablo en direction de l'hôpital de Baeza
Dans l’ambulance avec Pablo en direction de l’hôpital de Baeza

A l’hôpital, tout se passe très bien mais les soins ne sont pas une partie de plaisir. Autant l’anesthésie sur la tête me permet de supporter les points autant dans le dos, j’ai mal. En fait, j’ai mal dans le dos car j’ai aussi des gros coups de soleil. Je vous entends aussi me dire : « mais comment ça, t’as des coups de soleil dans le dos ?« . Pour ceux qui ne suivent pas avec assiduité mon voyage, mon ami, Emeric, m’avait donné un tee-shirt style « meilleure grimpeur du Tour de France ». Manque de chance ce maillot m’a irrité le torse et ça me faisait mal les jours suivants. Alors l’avant-dernier jour en Colombie, j’ai roulé quelques heures sans haut avant de sentir que le soleil me brûlait…

Repos à la casa de ciclistas de Tumbaco

Je passe la nuit à l’hôpital tranquillement et, le lendemain matin, Pablo et son collègue me ramènent l’ensemble de mes affaires et m’emmènent au bus pour Tumbaco pour rejoindre la casa de ciclista de Santiago. Ce dernier est mécanicien pour les vélos chez lui et met à disposition une place dans son jardin et un garage pour les cyclistes de passage. Il me reçoit très bien et m’intègre à sa famille. Ses filles étant absentes et étant donné mon état, il me propose de dormir dans la chambre d’une de ses filles pour quelques dollars.

Cette chute m’aura mis un sérieux coup au moral mais je dois reconnaître que j’ai eu beaucoup de chance car mes blessures ne sont pas si graves et mon vélo n’a quasiment rien. Seul le support de la sacoche de guidon est cassé et il manque une vis sur le système de blocage du guidon. Les quelques jours à récupérer à Tumbaco m’auront redonné le sourire et c’est l’occasion pour moi de faire la rencontre d’autres cyclistes. Il y a notamment deux Allemands, Johanes et Matthias, avec qui je sympathise et qui me donnent de précieux conseils pour la suite de mon voyage.

Petit déjeuner à la Casa de ciclistas
Petit déjeuner à la Casa de ciclistas

Quito

Je n’avais pas l’intention de visiter Quito initialement mais mon repos forcé m’y a finalement incité. Johanes et Matthias, qui ont déjà visité la ville, se joignent à moi et me servent de guide. Comme c’est dimanche, la circulation des voitures est interdite sur certains tronçons à l’image de la Ciclovia à Bogota. Même si touristiquemet, on se contente de se balader dans  le centre historique, il fait beau et c’est agréable de se balader dans les rues de Quito. On visite quand même la Basílica del Sagrado Voto Nacional où l’on peut monter presque tout en haut et avoir une vue superbe sur la ville.

Panorama de Quito depuis la Basílica del Sagrado Voto Nacional
Panorama de Quito depuis la Basílica del Sagrado Voto Nacional

Quito m’enchante plus que Bogota mais c’est aussi parce que je ne suis pas seul et que la ville est sûrement plus vivante le dimanche. Comme c’est le dernier jour de Johanes, il est prêt à goûter toute la nourriture qu’il n’a pas essayé jusque-là et pour ma part, je me contenterai d’une glace. Les helados de paila sont des simples jus de fruit versés dans un plat posé sur de la glace. Au contact du froid, la magie opère et le jus se transforme en glace. On ne peut pas faire plus artisanale.

Helado de Paila à la mûre dans Quito
Helado de Paila à la mûre dans Quito

Et pour finir la journée, au hasard d’une rue, on découvre la casa de artista qui est une sorte de bar où des artistes se produisent et on aura la chance de voir un spectacle de clowns. Exactement ce dont j’ai besoin pour me redonner le sourire !

Spectacle de cirque à la Casa de artista à Quito
Spectacle de cirque à la Casa de artista à Quito

 

6 thoughts on “De la frontière équatorienne à l’hôpital 

  1. Antho !!
    T’es un guerrier Fang ou pas ? 🙂 C’est pas trois petits points de suture qui vont entamer ta motivation quand même. Tu crois que Bear Grylls, il s’est jamais cassé la geule …
    Un peu de repos, une cuisse de CUY et c’est reparti !
    Par contre, tu me feras le plaisir de mettre ton casque, en descente, en montée, en ville, en rase campagne…dès que t’as les fesses sur ta selle.
    Bon j’espère que ça va quand même… fais gaffe l’ami.
    Bonne route !

    1. Greg !!
      Merci pour ton message, il m’a bien fait rire même je pense qu’un guerrier Fang ça n’envoie pas des masses.
      Je m’attendais à avoir le commentaire de quelqu’un qui me dirait de mettre mon casque. Voilà c’est fait ! T’inquiète pas, maintenant ça va beaucoup mieux, j’enlève les points de suture aujourd’hui et j’ai retrouvé la forme.

    1. Merci Liliane, ça me fait plaisir que tu trouves les photos belles. Je vais mieux depuis la chute et j’ai repris la route, j’ai aussi retrouvé la motivation de pédaler :).

  2. Anthony,
    ne te sens pas de tout coupable de ne pas avoir mis ton casque.
    C’est sûr, un bon casque protège, surtout d’une chute de vitesse élevée.
    Maintenant tu es de nouveau sur ton chemin et d’autres aventures t’attendent d’ici séptembre.
    En tous cas moi je prends assez souvent le Vélo2 auour des 13 villes fe Cergy Pontoise et je metts jamais mon casque. Peut-être je devrais car désfois je slalome un peu trôp.
    Et voilà, nous sommes avec toi, y compris Hazel qui t’envoie plein de gazouilles regonflantes.
    Andrew

    1. Je pense qu’il est important de mettre son casque à vélo, surtout en ville, dans les zones de circulation importante ou en descente. J’ai eu beaucoup de chance mais c’est de loin la plus grosse connerie de mon voyage.
      J’ai repris ma route et ça se passe bien. Merci pour les encouragements.

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