El Putumayo : les portes de l’Amazonie

En Colombie, les gens parlent beaucoup de leurs départements, il y en a 33 en tout. Tous ceux que j’ai traversé revendiquent leur singuralité mais certains ont une identité culturelle plus forte que d’autres. C’est le cas du Putumayo et cela est notamment dû à la forte présence de tribues indigènes.

El Trampolin de la Muerte

De Pasto à Mocoa, il existe un tronçon de piste en pierre de 64 kilomètres qui est tristement célèbre pour avoir été particulièrement dangeureux. Cette portion de piste, dénommée El Trampolín de la Muerte, est un passage presque obligé des cyclistes tellement il est fameux.

Carlos et Jenny (membres du réseau Warmshowers habitants à Pasto) m’ont accompagné de Pasto jusqu’au premier col et cela m’a bien motivé car j’y suis arrivé plus rapidement que si j’avais été seul. Cela me laisse plus de temps pour profiter du reste de la route et en particulier de la vallée de Sibundoy qui est remplie d’arbres fruitiers et notamment de tomate del arbol. La générosité des Colombiens est toujours palpable puisque dès mon premier arrêt pour admirer la vue sur le lac de Cocha, une famille me proposera de m’offrir à manger.

Languna Cocha
Languna Cocha

Le midi à El Encano, je découvre enfin le fameux cuy qui est une sorte de gros hamster grillé. C’est un plat apprécié par les Colombiens qui est plutôt mangé en fin de semaine. Malheureusement, je croise le stand en repartant juste après avoir mangé…

Cuy en vente à El Encano
Cuy en vente à El Encano

La veille d’attaquer le Trampolín de la Muerte, je dors chez la famille indigène Aguillon Chindoy qui accueille des cyclistes. José me fait découvrir un peu la culture de son peuple et le village de Sibundoy mais pour en apprendre un peu plus, il faudrait que je passe plus qu’une soirée avec eux. José m’a paru un drôle de personnage, qui voyage également à vélo. Il a fabriqué lui même son porte-bagage arrière à l’aide de fer à béton et ses sacoches avec des bidons de peinture en plastique. Il m’a raconté sa manière de voyager et elle est vraiment noble. Pour la nourriture ou l’hébergement, il s’arrange avec les locaux pour faire des petits travaux ou vend les bracelets qu’il fabrique.

José en train de préparer les grains de maïs
José en train de préparer les grains de maïs

Le patriarche de la famille, Benjamin, me propose de rester plus longtemps et de visiter son élevage de bovins mais je ne souhaite pas m’arrêter plus longtemps. Il est également Chaman et soigne à base de plante et prépare également la fameuse boisson Yahé. Cette potion, à base d’une liane du même nom, permettrait de purifier son corps (elle fait vomir) et d’en apprendre d’avantage sur soi-même au travers des visions qu’elle prodigue. Celle-ci se prend avec toute une cérémonie et les gens qui m’en ont parlé en parlent avec beaucoup de respect, certains avec peur. Benjamin sera très intéressé par mon vélo et notamment par ma sonnette, si bien que je lui offrirai de bon cœur.

Quant à la mère des huit enfants, Mamá Charro, elle essaye de me refourguer de l’artisanat « indigène » mais ça reste des bracelets avec des perles en plastique…

Mamá Charro À Sibundoy
Mamá Charro À Sibundoy

Trampolín de la Muerte, ma journée la plus humide depuis mes premiers kilomètres. Il a plu la majeure partie de la journée et je n’ai pas pu profiter de la magnifique vue sur les montagnes dont m’avait parlé José. En revanche, l’engagement a été à la hauteur de la réputation de la route. En soi, la route n’est pas si périlleuse que ça car de nombreux travaux y ont été faits semble-t-il mais certains passages restent dangereux avec des risques de glissement de terrain ou d’éboulement. La difficulté du passage réside également dans le peu de points de ravitaillement disponibles et un relief toujours en pente. Malgré tout, j’ai apprécié ce passage même si la descente finale sur Pasto commençait à être longue.

Passage dangereux dans le Trampolín de la Muerte
Passage dangereux dans le Trampolín de la Muerte

Las Cascadas del Fin del Mundo

Après Mocoa, je m’offre un bon moment de détente aux célèbres cascades del Fin del Mundo (il ne s’agit pas là d’Ushuaïa mais plutôt d’un nom un peu touristique). Victor, un Colombien en visite, m’accompagnera tout le long du chemin et j’y passerai plus de trois heures. J’y suis un dimanche donc de nombreuses familles colombiennes viennent y déjeuner malgré un accès difficile. Les cascades sont vraiment jolies et la dernière Fin del  Mundo est particulièrement impressionnante.

Cascade de Fin del Mundo près de Mocoa
Cascade de Fin del Mundo près de Mocoa

En reprenant la route les jours suivants, je longe un oléoduc à partir de Santa Anna et ce jusqu’en Equateur. Je n’ai pas compris beaucoup de choses au sujet de la production de pétrole de la Colombie si ce n’est que le pétrole serait acheminé sur la côte pacifique et que le prix du litre d’essence ou de gasoil est très cher pour un pays producteur. A Bogotá par exemple, le litre coûte près de 8000 pesos (environ 2,30€). Seuls les départements frontaliers de l’Equateur bénéficient de tarifs plus avantageux puisqu’aux environs de Pasto, le prix est moins élevé : 6000 pesos (environ 1,75€).

Oléoduc dans le Putumayo
Oléoduc dans le Putumayo

Ces dernières journées ne sont pas de tout repos mais j’en profite vraiment. Le long de route, je m’arrête régulièrement pour observer les paysages verdoyants et même un groupe de pêcheurs au filet dans une petite rivière dont la méthode est plus efficace que technique.

Pêcheurs au filet dans un cour d'eau après Puerto Caicedo
Pêcheurs au filet dans un cour d’eau après Puerto Caicedo

Lors de mon passage dans le village de Puerto Umbria, je me serais cru dans une ascension du Tour de France. Ok, j’exagère un peu mais voir une paire de militaires tous les 50 mètres vous faire un signe d’encouragement, c’est toujours très gratifiant. Chaque jour offre ses moments de sourire.

De Santa Ana à San Miguel, le défilement des kilomètres au compteur est rendu difficile par une route non terminée et parfois des tronçons manquants d’à peine quelques centaines de mètres, ce que je ne me m’explique pas. Ça n’est que lors de ma dernière nuit en Colombie en dormant chez les pompiers de El Hormiga que j’obtiens la réponse. En effet, selon eux, certaines tribus indigènes espèrent tirer profit des travaux de la route qui passe sur leur terre et refusent que celle-ci soit réalisée sans compensation.

Tronçon de route non terminé entre Santa Ana et San Miguel
Tronçon de route non terminé entre Santa Ana et San Miguel

Finalement, ce sont tous ces petits détails qui font de la Colombie un pays chaleureux, qui a beaucoup à offrir et dont il me reste tant à découvrir.

 

17 thoughts on “El Putumayo : les portes de l’Amazonie

  1. Salut tout d’abord merci pour ton recit. Peux tu me dire ou se situe cette famille exactement ? Je passe par la d’ici quelques jours et je cherche un lieu pour une nuit ou 2 dans cet esprit.. merci bien

  2. Pas mal la cascade de la fin de monde !
    T’as pas fait un selfie au bord du gouffre toi ? J’aimerais bien voir ce que ça donne.

    Et t’as pas gouté le Cuy…Quel dommage 🙂

    1. Et non pas de selfie pour ma part car il n’y avait personne pour me tenir :-).
      Le Cuy, je devrais pouvoir le goût au Pérou. Ça a l’air d’intéresser beaucoup de monde alors j’en parlerai.

  3. C’est toujours avec beaucoup d’impatience que nous attendons tes récits. J’aime ton style, il est vivant. Tu parles du pays, des gens, de ce que tu vis. Bernard avait mangé du cochon d’Inde au Pérou, mais il n’était pas très bien cuisiné. Sois prudent, bisous.

    1. Merci Maman. Tu as fait de la pub au près de tes copines, j’ai vu .
      J’avais pris du retard sur les articles mais c’est presque rattrapé maintenant. Il manquera l’itinéraire à mettre à jour mais il faut que j’aille dans un cybercafé pour ça. Bisous

  4. Top ces articles. Et supers photos avec! C est vrai que lors de notre voyage en Amérique du sud on nous avait dit que les casernes des pompiers était toujours un endroit possible pour les voyageurs. A retenir donc. Et sinon cb de km a la frontière Colombienne? Pas de soucis technique sur le velo? Un article sur le confort du guidon papillon serait le bienvenu. Bon courage et bonne route

    1. Salut Emeric,
      A la frontière, il me manque moins de 10km pour arriver aux 1500 ! Pour l’instant tout va bien sur le vélo, il est certes lourd mais il est vraiment solide. J’ai juste perdu une vis du porte-bagage avant, j’en ai pas pris de rechange.
      Je suis également content du guidon papillon surtout sur les parties monotones. C’est une bonne idée de faire un article sur le matériel mais j’attendrai d’avoir plus de recul.

        1. Le guidon papillon, c’est le guidon installé sur mon vélo ou celui d’Alexia. C’est le guidon des voyageurs car il offre de multiples positions un peu à l’image de celui d’un vélo de course mais pour une position redressée.
          J’ai déjà Quito hier et je vais en direction du Parc du Cotopaxi.

      1. Anthony,
        ne te sens pas de tout coupable de ne pas avoir mis ton casque.
        C’est sûr, un bon casque protège, surtout d’une chute de vitesse élevée.
        Maintenant tu es de nouveau sur ton chemin et d’autres aventures t’attendent d’ici séptembre.
        En tous cas moi je prends assez souvent le Vélo2 auour des 13 villes fe Cergy-Pontoise et je ne portes jamais mon casque. Peut-être je devrais car désfois je slalome un peu trôp.
        Et voilà, nous sommes avec toi, y compris Hazel qui t’envoie plein de gazouilles regonflantes.
        Andrew

  5. Anthony. C’est vraiment trop cool de te lire et d’avoir de tes nouvelles !! ça a l’air magnifique ! Suis contente que tout se passe bien pour toi et que ce voyage t’apporte du plaisir en dépit des efforts physiques que tu fournis ! Alexia ne va pas te reconnaître ! ça me donnerait presque envie de grimpouiller à vélo et de manger du hamster tellement c’est beau ! Merci de nous faire partager ton voyage ! On finira peut etre par te rejoindre qui sait.. Attention je t’ai entendu dire « non ! au secours » lol ! Bises et bonne continuation !

    1. Merci Annie pour ton commentaire, ça me fait plaisir que tu m’écrives un message et d’autant plus si c’est pour me dire que c’est agréable de me lire . As-tu regardé aussi les vidéos postées sur Facebook ?
      En plus de la barbe, j’ai perdu un peu de poids entre 5 et 6 kg je pense mais mon corps va s’habituer et se stabiliser sans doute.

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